VI
Aveux
Après la lecture de la lettre du prince, père d’Henri, Rodolphe resta quelque temps triste et pensif ; puis, un rayon d’espoir éclairant son front, il revint auprès de sa fille, à qui Clémence prodiguait en vain les plus tendres consolations.
– Mon enfant, tu l’as dit toi-même, Dieu a voulu que ce jour fût celui des explications solennelles, dit Rodolphe à Fleur-de-Marie, je ne prévoyais pas qu’une nouvelle et grave circonstance dût encore justifier tes paroles.
– De quoi s’agit-il, mon père ?
– Mon ami, qu’y a-t-il ?
– De nouveaux sujets de crainte.
– Pour qui donc, mon père ?
– Pour toi.
– Pour moi ?
– Tu ne nous as avoué que la moitié de tes chagrins, pauvre enfant.
– Soyez assez bon pour vous expliquer, mon père, dit Fleur-de-Marie en rougissant.
– Maintenant je le puis, je n’ai pu le faire plus tôt, ignorant que tu désespérais à ce point de ton sort. Écoute, ma fille chérie, tu te crois, ou plutôt tu es bien malheureuse. Lorsqu’au commencement de notre entretien tu m’as parlé des espérances qui te restaient, j’ai compris… mon cœur a été brisé… car il s’agissait pour moi de te perdre à jamais, de te voir t’enfermer dans un cloître, de te voir descendre vivante dans un tombeau. Tu voudrais entrer au couvent…
– Mon père…
– Mon enfant, est-ce vrai ?
– Oui, si vous me le permettez, répondit Fleur-de-Marie d’une voix étouffée.
– Nous quitter ! s’écria Clémence.
– L’abbaye de Sainte-Hermangilde est bien rapprochée de Gerolstein : je vous verrai souvent, vous et mon père.
– Songez donc que de tels vœux sont éternels, ma chère enfant. Vous n’avez pas dix-huit ans, et peut-être un jour…
– Oh ! je ne me repentirai jamais de la résolution que je prends : je ne trouverai le repos et l’oubli que dans la solitude d’un cloître, si toutefois mon père, et vous, ma seconde mère, vous me continuez votre affection.
– Les devoirs, les consolations de la vie religieuse pourraient, en effet, dit Rodolphe, sinon guérir, du moins calmer les douleurs de ta pauvre âme abattue et déchirée. Et, quoiqu’il s’agisse de la moitié du bonheur de ma vie, il se peut que j’approuve ta résolution. Je sais ce que tu souffres, et je ne dis pas que le renoncement au monde ne doive pas être le terme fatalement logique de ta triste existence.
– Quoi ! vous aussi, Rodolphe ! s’écria Clémence.
– Permettez-moi, mon amie, d’exprimer toute ma pensée, reprit Rodolphe. Puis, s’adressant à sa fille : Mais avant de prendre cette détermination extrême, il faut examiner si un autre avenir ne serait pas plus selon tes vœux et selon les nôtres. Dans ce cas, aucun sacrifice ne me coûterait pour assurer ton avenir.
Fleur-de-Marie et Clémence firent un mouvement de surprise ; Rodolphe reprit en regardant fixement sa fille :
– Que penses-tu… de ton cousin le prince Henri ?
Fleur-de-Marie tressaillit et devint pourpre.
Après un moment d’hésitation elle se jeta dans les bras du prince en pleurant.
– Tu l’aimes, pauvre enfant !
– Vous ne me l’aviez jamais demandé, mon père ! répondit Fleur-de-Marie en essuyant ses yeux.
– Mon ami, nous ne nous étions pas trompés, dit Clémence.
– Ainsi, tu l’aimes…, ajouta Rodolphe en prenant les mains de sa fille dans les siennes ; tu l’aimes bien, mon enfant chérie ?
– Oh ! si vous saviez, reprit Fleur-de-Marie, ce qu’il m’en a coûté de vous cacher ce sentiment dès que je l’ai eu découvert dans mon cœur. Hélas ! à la moindre question de votre part, je vous aurais tout avoué… Mais la honte me retenait et m’aurait toujours retenue.
– Et crois-tu qu’Henri connaisse ton amour pour lui ? dit Rodolphe.
– Grand Dieu ! mon père, je ne le pense pas ! s’écria Fleur-de-Marie avec effroi.
– Et lui… crois-tu qu’il t’aime ?
– Non, mon père… non… Oh ! j’espère que non… il souffrirait trop.
– Et comment cet amour est-il venu, mon ange aimé ?
– Hélas ! presque à mon insu… Vous vous souvenez d’un portrait de page ?
– Qui se trouve dans l’appartement de l’abbesse de Sainte-Hermangilde… c’était le portrait d’Henri.
– Oui, mon père… Croyant cette peinture d’une autre époque, un jour, en votre présence, je ne cachai pas à la supérieure que j’étais frappée de la beauté de ce portrait. Vous me dîtes alors, en plaisantant, que ce tableau représentait un de nos parents d’autrefois, qui, très-jeune encore, avait montré un grand courage et d’excellentes qualités. La grâce de cette figure, jointe à ce que vous me dîtes du noble caractère de ce parent, ajouta encore à ma première impression… Depuis ce jour, souvent je m’étais plu à me rappeler ce portrait, et cela sans le moindre scrupule, croyant qu’il s’agissait d’un de nos cousins mort depuis longtemps… Peu à peu, je m’habituai à ces douces pensées… sachant qu’il ne m’était pas permis d’aimer sur cette terre…, ajouta Fleur-de-Marie avec une expression navrante, et en laissant de nouveau couler ses larmes. Je me fis de ces rêveries bizarres une sorte de mélancolique intérêt, moitié sourire et moitié larmes ; je regardai ce joli page des temps passés comme un fiancé d’outre-tombe… que je retrouverais peut-être un jour dans l’éternité ; il me semblait qu’un tel amour était seul digne d’un cœur qui vous appartenait tout entier, mon père… Mais pardonnez-moi ces tristes enfantillages.
– Rien de plus touchant, au contraire, pauvre enfant ! dit Clémence profondément émue.
– Maintenant, reprit Rodolphe, je comprends pourquoi tu m’as reproché un jour, d’un air chagrin, de t’avoir trompée sur ce portrait.
– Hélas ! oui, mon père… Jugez de ma confusion, lorsque plus tard la supérieure m’apprit que ce portrait était celui de son neveu, l’un de nos parents… Alors, mon trouble fut extrême, je tâchai d’oublier mes premières impressions, mais, plus j’y tâchais, plus elles s’enracinaient dans mon cœur, par suite même de la persévérance de mes efforts… Malheureusement encore, souvent je vous entendis, mon père, vanter le cœur, l’esprit, le caractère du prince Henri…
– Tu l’aimais déjà, mon enfant chérie, alors que tu n’avais encore vu que son portrait et entendu parler que de ses rares qualités.
– Sans l’aimer, mon père, je sentais pour lui un attrait que je me reprochais amèrement ; mais je me consolais en pensant que personne au monde ne saurait ce triste secret, qui me couvrait de honte à mes propres yeux. Oser aimer… moi… moi… et puis ne pas me contenter de votre tendresse, de celle de ma seconde mère ! Ne vous devais-je pas assez pour employer toutes les forces, toutes les ressources de mon cœur à vous chérir tous deux ?… Oh ! croyez-moi, parmi mes reproches, ces derniers furent les plus douloureux. Enfin, pour la première fois je vis mon cousin… à cette grande fête que vous donniez à l’archiduchesse Sophie ; le prince Henri ressemblait d’une manière si saisissante à son portrait que je le reconnus tout d’abord… Le soir même, mon père, vous m’avez présenté à mon cousin, en autorisant entre nous l’intimité que permet la parenté.
– Eh bientôt vous vous êtes aimés ?
– Ah ! mon père, il exprimait son respect, son attachement, son admiration pour vous avec tant d’éloquence… vous m’aviez dit vous-même tant de bien de lui !…
– Il le méritait… Il n’est pas de caractère plus élevé, il n’est pas de meilleur et de plus valeureux cœur.
– Ah ! de grâce, mon père… ne le louez pas ainsi… Je suis déjà si malheureuse !…
– Et moi, je tiens à te bien convaincre de toutes les rares qualités de ton cousin… Ce que je te dis t’étonne… Je le conçois, mon enfant… Continue…
– Je sentais le danger que je courais en voyant le prince Henri chaque jour, et je ne pouvais me soustraire à ce danger. Malgré mon aveugle confiance en vous, mon père, je n’osais vous exprimer mes craintes. Je mis tout mon courage à cacher cet amour ; pourtant, je vous l’avoue, mon père, malgré mes remords, souvent, dans cette fraternelle intimité de chaque jour, oubliant le passé, j’éprouvai des éclairs de bonheur inconnu jusqu’alors, mais bientôt suivis, hélas ! de sombres désespoirs, dès que je retombais sous l’influence de mes tristes souvenirs… Car, hélas ! s’ils me poursuivaient au milieu des hommages et des respects de personnes presque indifférentes, jugez, jugez… mon père, de mes tortures, lorsque le prince Henri me prodiguait les louanges les plus délicates… m’entourait d’une adoration candide et pieuse, mettant, disait-il, l’attachement fraternel qu’il ressentait pour moi sous la sainte protection de sa mère, qu’il avait perdue bien jeune. Du moins, ce doux nom de sœur qu’il me donnait, je tâchais de le mériter, en conseillant mon cousin sur son avenir, selon mes faibles lumières, en m’intéressant à tout ce qui le touchait, en me promettant de toujours vous demander pour lui votre bienveillant appui… Mais souvent, aussi, que de tourments, que de pleurs dévorés, lorsque par hasard le prince Henri m’interrogeait sur mon enfance, sur ma première jeunesse… Oh ! tromper… toujours tromper… toujours craindre… toujours mentir, toujours trembler devant le regard de celui qu’on aime et qu’on respecte, comme le criminel tremble devant le regard inexorable de son juge !… Oh ! mon père ! j’étais coupable, je le sais, je n’avais pas le droit d’aimer ; mais j’expiais ce triste amour par bien des douleurs… Que vous dirai-je ? Le départ du prince Henri, en me causant un nouveau et violent chagrin, m’a éclairée… J’ai vu que je l’aimais plus encore que je ne croyais… Aussi, ajouta Fleur-de-Marie avec accablement, et comme si cette confession eût épuisé ses forces, bientôt je vous aurais fait cet aveu, car ce fatal amour a comblé la mesure de ce que je souffre… Dites, maintenant que vous savez tout, dites, mon père, est-il pour moi un autre avenir que celui du cloître ?
– Il en est un autre, mon enfant… oui… et cet avenir est aussi doux et aussi riant, aussi heureux que celui du couvent est morne et sinistre !
– Que dites-vous, mon père ?
– Écoute-moi à mon tour… Tu sens bien que je t’aime trop, que ma tendresse est trop clairvoyante pour que ton amour et celui d’Henri m’aient échappé ; au bout de quelques jours, je fus certain qu’il t’aimait, plus encore peut-être que tu ne l’aimes…
– Mon père… non… non… c’est impossible, il ne m’aime pas à ce point.
– Il t’aime, te dis-je… Il t’aime avec passion, avec délire.
– Ô mon Dieu ! Mon Dieu !
– Écoute encore… lorsque je t’ai fait cette plaisanterie du portrait, j’ignorais qu’Henri dût venir bientôt voir sa tante à Gerolstein. Lorsqu’il y vint, je cédai au penchant qu’il m’a toujours inspiré ; je l’invitai à nous voir souvent… Jusqu’alors, je l’avais traité comme mon fils, je ne changeai rien à ma manière d’être envers lui… Au bout de quelques jours, Clémence et moi nous ne pûmes douter de l’attrait que vous éprouviez l’un pour l’autre… Si ta position était plus douloureuse, ma pauvre enfant, la mienne aussi était pénible, et surtout d’une délicatesse extrême… Comme père, sachant les rares et excellentes qualités d’Henri, je ne pouvais qu’être profondément heureux de votre attachement, car jamais je n’aurais pu rêver un époux plus digne de toi.
– Ah ! mon père… pitié ! pitié !
– Mais, comme homme d’honneur, je songeais au triste passé de mon enfant… Aussi, loin d’encourager les espérances d’Henri, dans plusieurs entretiens je lui donnai des conseils absolument contraires à ceux qu’il aurait dû attendre de moi si j’avais songé à lui accorder ta main. Dans des conjonctures si délicates, comme père et comme homme d’honneur, je devais garder une neutralité rigoureuse, ne pas encourager l’amour de ton cousin, mais le traiter avec la même affabilité que par le passé… Tu as été jusqu’ici si malheureuse, mon enfant chérie, que, te voyant pour ainsi dire te ranimer sous l’influence de ce noble et pur amour, pour rien au monde je n’aurais voulu te ravir ces joies divines et rares. En admettant même que cet amour dût être brisé plus tard… tu aurais au moins connu quelques jours d’innocent bonheur… Et puis, enfin… cet amour pouvait assurer ton repos à venir…
– Mon repos ?
– Écoute encore… Le père d’Henri, le prince Paul, vient de m’écrire ; voici sa lettre… Quoiqu’il regarde cette alliance comme une faveur inespérée… il me demande ta main pour son fils, qui, me dit-il, éprouve pour toi l’amour le plus respectueux et le plus passionné.
– Ô mon Dieu ! Mon Dieu ! dit Fleur-de-Marie, en cachant son visage dans ses mains, j’aurais pu être si heureuse !
– Courage, ma fille bien-aimée ! Si tu le veux, ce bonheur est à toi ! s’écria tendrement Rodolphe.
– Oh ! jamais !… Jamais !… Oubliez-vous ?…
– Je n’oublie rien… Mais que demain tu entres au couvent, non-seulement je te perds à jamais… mais tu me quittes pour une vie de larmes et d’austérités… Eh bien ! te perdre pour te perdre… qu’au moins je te sache heureuse et mariée à celui que tu aimes… et qui t’adore.
– Mariée avec lui… moi, mon père !…
– Oui… mais à la condition que, sitôt après votre mariage, contracté ici la nuit, sans d’autres témoins que Murph pour toi et que le baron de Graün pour Henri, vous partirez tous deux pour aller dans quelque tranquille retraite de Suisse ou d’Italie, vivre inconnus, en riches bourgeois. Maintenant, ma fille chérie, sais-tu pourquoi je me résigne à t’éloigner de moi ? Sais-tu pourquoi je désire qu’Henri quitte son titre une fois hors de l’Allemagne ? C’est que je suis sûr qu’au milieu d’un bonheur solitaire, concentrée dans une existence dépouillée de tout faste, peu à peu tu oublieras cet odieux passé, qui t’est surtout pénible parce qu’il contraste amèrement avec les cérémonieux hommages dont à chaque instant tu es entourée.
– Rodolphe a raison, s’écria Clémence. Seule avec Henri, continuellement heureuse de son bonheur et du vôtre, il ne vous restera pas le temps de songer à vos chagrins d’autrefois, mon enfant.
– Puis, comme il me serait impossible d’être longtemps sans te voir, chaque année Clémence et moi nous irons vous visiter.
– Et un jour… lorsque la plaie dont vous souffrez tant, pauvre petite, sera cicatrisée… lorsque vous aurez trouvé l’oubli dans le bonheur… et ce moment arrivera plus tôt que vous ne le pensez… vous reviendrez près de nous pour ne plus nous quitter !
– L’oubli dans le bonheur !… murmura Fleur-de-Marie qui, malgré elle, se laissait bercer par ce songe enchanteur.
– Oui… oui, mon enfant, reprit Clémence, lorsqu’à chaque instant du jour vous vous verrez bénie, respectée, adorée par l’époux de votre choix, par l’homme dont votre père vous a mille fois vanté le cœur noble et généreux… aurez-vous le loisir de songer au passé ? Et, lors même que vous y songeriez… comment ce passé vous attristerait-il ? Comment vous empêcherait-il de croire à la radieuse félicité de votre mari ?
– Enfin c’est vrai… car dis-moi, mon enfant, reprit Rodolphe, qui pouvait à peine contenir des larmes de joie en voyant sa fille ébranlée, en présence de l’idolâtrie de ton mari pour toi… lorsque tu auras la conscience et la preuve du bonheur qu’il te doit… quels reproches pourras-tu te faire ?
– Mon père…, dit Fleur-de-Marie, oubliant le passé pour cette espérance ineffable, tant de bonheur me serait-il encore réservé ?
– Ah ! j’en étais bien sûr ! s’écria Rodolphe dans un élan de joie triomphante, est-ce qu’après tout un père qui le veut… ne peut pas rendre au bonheur son enfant adorée ?…
– Elle mérite tant… que nous devions être exaucés, mon ami, dit Clémence en partageant le ravissement du prince.
– Épouser Henri… et un jour… passer ma vie entre lui… ma seconde mère… et mon père…, répéta Fleur-de-Marie, subissant de plus en plus la douce ivresse de ces pensées.
– Oui, mon ange aimé, nous serons tous heureux !… Je vais répondre au père d’Henri que je consens au mariage, s’écria Rodolphe en serrant Fleur-de-Marie dans ses bras avec une émotion indicible. Rassure-toi, notre séparation sera passagère… les nouveaux devoirs que le mariage va t’imposer raffermiront encore tes pas dans cette voie d’oubli et de félicité où tu vas marcher désormais… car, enfin, si un jour tu es mère, ce ne sera pas seulement pour toi qu’il te faudra être heureuse…
– Ah ! s’écria Fleur-de-Marie avec un cri déchirant, car ce mot de mère la réveilla du songe enchanteur qui la berçait, mère !… moi ? Oh ! jamais ! Je suis indigne de ce saint nom… Je mourrais de honte devant mon enfant… si je n’étais pas morte de honte devant son père… en lui faisant l’aveu du passé…
– Que dit-elle ? mon Dieu ! s’écria Rodolphe, foudroyé par ce brusque changement…
– Moi mère ! reprit Fleur-de-Marie avec une amertume désespérée, moi respectée, moi bénie par un enfant innocent et candide ! Moi autrefois l’objet du mépris de tous ! Moi profaner ainsi le nom sacré de mère… oh ! jamais… Misérable folle que j’étais de me laisser entraîner à un espoir indigne !…
– Ma fille, par pitié, écoute-moi.
Fleur-de-Marie se leva droite, pâle, et belle de la majesté d’un malheur incurable.
– Mon père… nous oublions qu’avant de m’épouser… le prince Henri doit connaître ma vie passée.
– Je ne l’avais pas oublié, s’écria Rodolphe ; il doit tout savoir… il saura tout…
– Et vous ne voulez pas que je meure… de me voir ainsi dégradée à ses yeux ?
– Mais il saura aussi quelle irrésistible fatalité t’a jetée dans l’abîme… mais il saura ta réhabilitation.
– Et il sentira enfin, reprit Clémence en serrant Fleur-de-Marie dans ses bras, que lorsque je vous appelle ma fille… il peut sans honte vous appeler sa femme…
– Et moi… ma mère… j’aime trop… j’estime trop le prince Henri pour jamais lui donner une main qui a été touchée par les bandits de la Cité…
Peu de temps après cette scène douloureuse, on lisait dans la Gazette officielle de Gerolstein :
« Hier a eu lieu, en l’abbaye grand-ducale de Sainte-Hermangilde, en présence de Son Altesse Royale le grand-duc régnant et de toute la cour, la prise de voile de très-haute et très-puissante princesse Son Altesse Amélie de Gerolstein.
« Le noviciat a été reçu par l’illustrissime et révérendissime seigneur monseigneur Charles-Maxime, archevêque duc d’Oppenheim ; monseigneur Annibal-André Montano, des princes de Delphes, évêque de Ceuta in partibus infidelium et nonce apostolique, y a donné le salut et la bénédiction papale.
« Le sermon a été prononcé par le révérendissime seigneur Pierre d’Asfeld, chanoine du chapitre de Cologne, comte du Saint-Empire romain.
« VENI, CREATOR OPTIME. »